mercredi 4 octobre 2017

Un souvenir de Laconie


Ste Sophie XIIe s. / Monemvasia
Monemvasia, l’endroit peut-être le plus touristique de la Laconie en Grèce. Un Mont-St-Michel en miniature, mais ocre et grillé par le soleil, il faut monter sur le rocher pour admirer Ste Sophie, cette église du XIIe s. magnifiquement restaurée il y a peu, et les toits de la ville sur fond de mer turquoise intense.

Tes blanches mains
Qui imprégnaient de baumes nos plaies
Se convulsent à présent liées dans le dos
Sur la croix de ton corps
Comme si elles étaient, ma sœur,
Des mains de larron.
Ton corps frêle s’enveloppe
Du manteau de cendre de la démence.
Tes yeux en sont restés
Deux tours de verre inhabitées
Et y tournent égarées
Les ombres du passé.
Te souviens-tu ?
Elle t’avait jadis offert, la mère,
Une robe rose
Et un petit parapluie rose.
Tu grimpais la pente fleurie
Dans le matin printanier
Aérienne et diaphane
-       une nuée rosée de lumière.
Tu regardais le ciel
Comme si quelque chose d’en haut t’invitait.
Seules les nattes affligées
De tes cheveux noirs
Alourdissaient tes frêles épaules.
J’avais peur qu’en un instant tu ne périsses
Semblable à la lumière rosée
Dans le couchant.
Je me penche près de toi et je t’apporte
Nos matines enfantines
Pour que tu respires profondément
L’odeur salée de notre île,
Les murmures du soir
Et ayant traversé la brume du retour
Que tu abordes à mon côté.
Dans la petite ruelle aux pavés millénaires, il est une minuscule échoppe où beaucoup trouvent de l’eau pour adoucir les assauts d’un roi Soleil trop fougueux. Sur la porte ouverte,  deux ou trois longues élastiques retiennent inclinés des petits livres à la  révérence discrète. Surprise ! Quelques uns sont en français.  
Mon frère Michel choisit un guide historique de la ville. Il nous en parlera au souper, sur la terrasse ombragée par les tamaris du port de Néapoli où nous séjournons. Ma sœur Blandine emporte un petit ouvrage de Georges Vizyinos, Le péché de ma mère. « Impressionnant ! » me dira-t-elle un peu plus tard. Quant à moi, je tombe par hasard sur un poète du lieu, à la destinée peu commune  (comme on peut le lire sur Internet): Yannis Ritsos. Un tout petit livre en deux langues : grec à gauche et sa traduction française sur les pages de droite. Le Chant de ma sœur. L’auteur adresse un long poème à sa sœur aînée Loula, enfermée dans un asile psychiatrique. Ce sont quelques extraits de ce beau texte, que j’avais envie de partager ici avec vous. Il va sans dire que je vous invite à lire cet écrivain mondialement reconnu, né en 1909 et mort en 1990.

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