« Les échecs en tournage comme ailleurs viennent souvent de ce qu'on s'accroche trop à la terre ou qu'on la lâche trop brutalement sans avoir desserré l'étreinte.
Il faut apprendre
à glisser et à lâcher plus qu'à faire œuvre de force.
On soulève
l'argile plus qu'on ne la resserre.
L'objet de la
poterie est un volume creux, créé de l'intérieur.
Un pot entoure un
vide et c'est ce vide qui lui donne forme et vie. »
Annie Fourmanoir-Gorius, Comme l’argile…
C’est la comparaison « comme ailleurs » qui m’invite à
faire le parallèle avec l’éducation des enfants. Ces quelques phrases exposent
les grands principes de cet art, au combien subtil, pratiqué par tous les
parents. Ici je parle de la mère, mais il est entendu que le propos concerne
aussi le père.
S’accrocher
trop à la terre
Je tends à éviter tout inconfort,
toute frustration à mon enfant. Je réponds à ses besoins dès qu’il en
manifeste. Pour ce faire, je le garde auprès de moi jour et nuit. Quand je le
confie à quelqu’un, c’est avec des recommandations tellement détaillées que ça décourage les plus patients et
les meilleurs éducateurs. Car je suis la seule à connaître ses besoins. Et même
si les circonstances m’y obligent, je ne leur fais pas confiance. Tout mon environnement est tributaire
des demandes de ce petit être-là. Tout ce que je fais pour lui et avec lui n’a que deux objectifs souvent
inconscients: qu’il réponde à l’image que je me suis faite de « l’enfant
idéal » et qu’il me rassure sur le fait que je suis une bonne mère.
Lâcher
brutalement la terre sans avoir desserré l’étreinte
A mon enfant, j’ai donné tout ce
dont il avait besoin pendant la grossesse, maintenant qu’il est né, ma vie peut
reprendre comme avant. Les personnes à qui je le confie ont toutes les
compétences nécessaires pour s’en occuper. Lui, il s’adapte. Ou bien, pendant
sa petite enfance, toute ma vie tournait autour de ce petit être, car on me l’a
dit : « Tout se joue avant six ans ! » et j’y crois. J’y ai
sacrifié beaucoup de temps et d’intérêts personnels que je me réjouis enfin de
retrouver. Alors maintenant, mon enfant n’est plus mon premier souci. Il a en
lui tout ce qu’il faut pour affronter le quotidien et le futur, avec nos
exigences de parents, les incessantes et très tentantes incitations à la
consommation, la violence physique, psychique et la peur, le chemin de l’école,
l’école, ses exigences et l’atmosphère de compétition, les camarades.
La parentalité s’est ajoutée à ma
vie mais ne l’a pas modifiée. Et comme ma vie me satisfait pleinement, que je
suis bien dans ma peau, mon enfant le ressent aussi et par conséquent il ne
peut qu’être bien, lui aussi.
Sur le tour du potier, quand on
serre trop la terre, il est très difficile de la centrer. Ensuite, si on a
réussi à la centrer, en serrant trop, on la décentre et il est impossible de
faire un objet. De même, quand sur le tour, l’objet en terre s’élève et qu’on
lâche brutalement la terre sans l’avoir progressivement desserrée, elle se
décentre et il est impossible de lui donner la forme souhaitée.
L’enfant, si on s’en occupe
excessivement , ou si on ne s’en occupe plus suffisamment , ne sera pas « centré » et il
aura beaucoup de difficultés à devenir celui qu’il est intrinsèquement.
Oscillant sans cesse entre ces deux pôles, dans le doute souvent, on s’efforce d’être une mère SUFFISAMMENT BONNE.
Oscillant sans cesse entre ces deux pôles, dans le doute souvent, on s’efforce d’être une mère SUFFISAMMENT BONNE.
(à suivre)
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