lundi 18 décembre 2017

Ma découverte de l'Amérique 1

 
Paysage du Vermont en 1973  USA
C’étail il y a presque un demi-siècle ; j’avais vingt ans et j’étais encore( ?)  déjà ( ?)  une vieille enfant.

Mon apprentissage de jeune fille au pair commence  dans le hall d’arrivée de l’aéroport de Boston. « Parents » pour moi ça veut dire « vieux », vieux comme mes propres parents, mais eux ont l’air beaucoup plus jeunes que moi. Si jeunes qu’ils pourraient être mon frère et ma sœur. Bob (Robert) et Connie (Constance) sont les parents des trois enfants dont je vais avoir à m’occuper ces prochains mois. Tenue d’étudiants en vacances, décontractés, très souriants, expansifs, ils m’accueillent comme si j’étais une de leurs camarades de collège.

Après une petite heure de voyage silencieux – je ne connais pas un mot d’anglais et ils ne savent pas le français – nous sommes accueillis dans une grande maison de Swampscott,  banlieue chic en bord de mer. C’est la maison familiale des parents de Connie. Ils sont là, avec les trois frères , la sœur et son mari et : Lizzy (Elisabeth) 7 ans,  Larry (Lawrence) 5 ans, Debbie (Deborah )3 ans, les trois enfants de Connie et Bob . Tous les membres de cette famille, à l’exclusion du beau-frère, sont plus petits que moi. Tous sont très mal habillés - Droits en avant, disait ma maman en parlant des personnes  qui ne soignaient pas leur apparence physique et vestimentaire – alors que moi j’ai mis mes habits les plus chics pour faire bonne impression dans ce milieu de professions libérales (médecin, avocat, professeur d’université).  Et puis, ma passion c’est la mode.  C’est pour l’assouvir que j’ai rejoint le monde du travail à seize ans (déjà une vieille enfant).  Issue d’une famille nombreuses à la compagne,  il me fallait trouver une source de revenus pour vivre comme je l’entendais.

Tout le monde prend place autour de la table incroyablement chargée de victuailles. On m’a placée à côté du beau-frère qui parle un peu français. Il fait les présentations et m’explique la raison de cette rencontre de famille.  Nous sommes le quatrième jeudi de novembre, Thanksgiving. C’est  «La Fête » aux Etats-Unis, familiale par excellence. Je n’en avais jamais entendu parler. Je découvre avec grand plaisir : la dinde farcie, la purée de patates douces, la confitures d’airelles,  le pain de maïs et la tarte aux noix de Pécan.   

Les trois enfants me détaillent pendant que les autres me questionnent par beau-frère interposé. Est-ce que mon père est banquier, car c’est, à leur connaissance,  la profession exercée majoritairement dans mon pays. Est-ce que je connais le « bon mot » suivant : « Quand tu vois un Suisse sauter par la fenêtre, suis-le car  là où il va il y a de l’argent ! »
Comment prononce-t-on mon prénom ? Et les enfants de s’esclaffer en entendant la traduction Mary Christmas. Et mon nom de famille ? G u é ? Comme gay ? « ça ne doit pas être facile tous les jours de porter un tel nom de famille ! » Pourquoi me disent-ils ça ? »
Et je crois que c’est à cette occasion que j’entends le mot « homosexuel » pour la première fois de ma vie ! (Quand je vous dis : encore une enfant…)


A la tombée de la nuit nous prenons la route pour la Nouvelle Angleterre, les trois enfants dans le cocon rempli de coussins de la voiture de Connie. Alors que je m’installe dans la deuxième voiture, au côté de Bob.  Après trois heures de route, la neige ralentit notre allure. « Five minutes » me dit mon chauffeur alors que la voiture quitte la grand-route et s’engage dans une petite route forestière qui monte en lacets, laissant apparaître ici et là quelques rares habitations de bois sombre, de construction très moderne : immenses baies vitrées et larges terrasses. Peu après avoir franchi le plus haut point de la colline, la route s’arrête devant une magnifique maison de bois dont la couleur et l’architecture se confondent  avec l’environnement boisé comme je le constaterai le lendemain au réveil.  Toutes les pièces de la maison, sauf  les salles de bain, ma chambre et le bureau de Bob à l’entresol, donnent sur un pré en pente légère orienté sud-ouest et un horizon  lointain de collines boisées qui me font penser au paysage jurassien.

Aucun commentaire: