dimanche 8 juillet 2018

Une aventure indienne 5


Saint Joseph
Une aventure indienne 5
Je le savais ! La messe, le dimanche et plus, je n’y couperais pas. C’est une communauté catholique qui m’accueille. Alors autant en profiter pour observer les us et coutumes du lieu.

D’abord, l’aspect général et l’aménagement intérieur des églises que j’ai vues à Calicut. Elles sont très vastes et très hautes et le toit ne repose pas directement sur les murs. L’espace libre entre deux permet le passage de la brise et le chant des oiseaux. Suspendues aux poutres de la charpente, les pâles des ventilateurs d’une grandeur impressionnante font frémir les écharpes des saris et les franges dorées des vêtements des autels. Les pieds nus des fidèles se réveillent au contact rafraichissant des dalles de marbre( ? ) ou de granit( ?). Un quart des praticants du jour y resteront et s’y assieront pendant l’heure et demie que durera l’office, les lourds bancs de bois n’étant pas en nombre suffisant pour accueillir toute l’assemblée.

Si l’on se concentre sur l’observation des statues, des bas-reliefs, des fresques et les nappes(?) des autels, on se croirait dans quelque temple bouddhiste. C’est très coloré, c’est rouge et or, ça scintille de brillants. « Un peu kitsch tout de même ! », diraient certains. Mais ce n’est pas aussi chargé, concentré, aussi confiné même parfois, que dans les temples bouddhistes. Et les personnages représentés ont tous le type européen/occidental. Dans celle d’aujourd’hui, une représentation peu commune de la Sainte Famille : Saint Joseph, et non la Vierge Marie, portant l’Enfant Jésus.

Les officiants. Sous leurs habits de cérémonie, des prêtres indiens, exactement comme les prêtres de chez nous… mais en beaucoup plus jeune ! Depuis plus d’un mois, je n’ai encore jamais vu de prêtres ou autres religieux âgés. Et en général ils sont très grands et très beaux ! Ça aide ! Des servants de messe, il n’y en a pas toujours. Une fois il y en avait huit vêtus comme dans les films de Don Camillo ou les très vieux films français, la longue aube blanche recouverte d’un surpli( ?) rouge. Ce matin, trois jeunes hommes, pantalon noir et longue chemise de coton blanc à col officier. Une belle tenue. 
Les fidèles : à de rares exceptions près, les femmes à gauche et les hommes, moins nombreux, à droite. Quand la messe est dite après un cours de catéchisme, les enfants s’installent sur les bancs de devant : petites filles à gauche (certaines en robes de tulle aux couleurs flashies). La moitié d’entre elles voile d’une mantille de dentelle blanche ou noire une tresse de jais qui descend tout le long du dos . Les garçons, en chemise et pantalon, à droite.  Mais attention, le prêtre, d’un geste péremptoire met un certain ordre là à travers. Le voilà qui place, déplace et s’épare certaines et certains comme au temps de mon enfance. Sauf qu’ici, il n’y a pas d’images saintes à s’échanger. Pas de missel. Rien dans les mains. Et on n ne badine pas.

L’ambiance. Tant qu’à y rester une heure trente autant y trouver du plaisir. J’ai dit aux Sœurs que je préfèrais les messes avec musique et chant. Et ça vaut le coup ? Imaginez un concert du groupe Abba et des  Sweet People  réunis (sans les balancements ni les briquets tendus vers la scène toutefois) mais avec cette énergie et ce swing séducteurs au possible. Croyez-moi, les « Hosanna », « Alleluïa » et autres « Amen » enrobés d’une « crème onctueuse » de malayalam (La Langue Chantante par excellence) chantés par les voix magnifiques de trois ou quatre choristes accompagnées d’un jeune homme jouant du syntétiseur, c’est autrement plus attirant pour le plus grand nombre que n’importe quel chant grégorien d’un quelconque couvent cistercien ! Et autrement plus rassembleur qu’une chansonnette entonnée par une laïque courageuse tentant de réveiller une assemblée de quelques paroissiens cacochymes!
Et c’est sur ces airs entrainants que je vois mon papa, « aux anges », entrainant une de ces splendides paroissiennes recouvertes de soieries scintillantes pour une valse de Vienne ou un slow langoureux devant ma maman si pieuse, évidemment très contrariée, rentrant sa tête dans ses épaules en serrant les lèvres, tentant de se concentrer sur sa prière. 

Quant au déroulement de la messe, il n’en diffère que par quelques détails :
Pour l’offrande, alors que chez nous il n’y a aucune gestuelle concrète d’offrande ou qu’ailleurs en Inde ou en Afrique, on offre un panier de riz, une corbeille de fruits, un grand pain, des gerbes de fleurs ; ici, quelques fidèles viennent en file indienne (sic) l’un derrière l’autre par l’allée centrale portant une enveloppe posée sur une assiette. Devant l’autel, ils sont accueillis par le prêtre qui les bénit d’un signe de croix sur le front puis ils vont déposer leur offrande au pied de l’autel. Pour la quête, une paroissienne nous tend un grand plat de métal. Vous imaginez celui qui ose y jeter une piécette ? Que des billets !
Pour « se donner le signe de paix » c’est bien mieux ici : on ne se touche pas. Personne ne peut s’accorder le droit de pénétrer la bulle d’intimité qui m’entoure et toucher ma peau, mon moi, sous prétexte de fraternité, de paix et Dieu sait quoi encore. Non, ici on s’incline respectueusement vers sa voisine de droite et puis celle de gauche, les deux mains à hauteur du menton. En bref,  le salut habituel ici.
A la communion, un petit autel maintient la distance entre le prêtre, ses aides, et les communiants. L’officiant effleure le vin du calice avec l’hostie avant de la déposer dans la bouche des fidèles. (La 1èrefois, je dirais que c’était un vin blanc doux, une autre fois un vin plus acide et d’autres fois encore, je pense que c’était du porto.) Pas mauvais cette petite touche de goût, parfum d’hostie !

Je le savais : pendant ce séjour, je renforcerais mon avance en matière de pratique religieuse. Toutes ces messes et ces prières ajoutées au tas de mon enfance (messe tous les jours avant d’aller à l’école + chapelet pendant les mois de mai ; messe et vêpres tous les dimanches, confession tous les samedis ; sans compter le nombre de dizaines de chapelet en famille le soir et le réveil en prières le matin) Qui dit mieux ? Le thème du dernier sermon entendu ici en français était : «Installer la nouvelle mise à jour ! « Update ». Comme votre natel, votre foi nécessite une nouvelle mise à jour ». 
Allez savoir pourquoi : je ne suis pas encore tentée par cette mise à jour !
Qui aura un bain de pieds en sortant de la messe un jour de mousson?

Aucun commentaire: